Les sarcophages en plomb dévoilent une partie de leurs mystères
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Eté 2020, lors de la phase de diagnostic, les archéologues de la Ville d’Arras mettaient au jour un sarcophage en plomb de 400 kilos, datant du IVe siècle sur le site de l’ancien Simply Market.
Durant l’été 2021, l’Institut National de Recherches Archéologiques Préventives se lançait dans une campagne de fouilles plus poussées sur le site devant accueillir un futur magasin Aldi, rue Georges-Auphelle. En quelques semaines, les archéologues ont mis au jour une véritable nécropole sur une surface de 1300m2. Un deuxième sarcophage en plomb puis un troisième en calcaire sont mis au jour, au milieu de 130 autres sépultures. Des tombes qui pourraient être plus nombreuses encore puisqu’une partie du parking, ainsi que le sol sous la dalle du supermarché n’ont pas été fouillés.
« La découverte de ces sarcophages à quelques mètres l’un de l’autre conforte le fait que les faubourgs situés au sud de la cité antique représentaient une zone de nécropole importante à la fin de l’Antiquité et au début du Moyen-Âge », souligne Mathieu Beghin, responsable du service archéologique de la Ville d’Arras. Si le premier sarcophage avait été ouvert en janvier 2021, le second ne l’a été que mercredi 30 mars.
Quels enseignements ?
Quels enseignements peuvent être tirés des premières analyses menées par le Centre de Conservation et d’Études de Ribémont-sur-Ancre où ont été transférés les sarcophages courant 2021.
Tout d’abord que les trois sarcophages étaient occupés. En effet, si l’on savait que le premier contenait les ossements d’un homme âgé entre 25 et 35 ans, le second contient également des ossements mais leur état de conservation est encore plus abîmé que ceux du premier. « Il contenait aussi un individu. Il s’agirait d’un homme mesurant environ 1m75 », confie Mathieu Béghin. « Le sarcophage a été corrodé et ça a abimé les restes humains. On garde bon espoir que les analyses en laboratoire nous apporteront davantage de résultats. » Le troisième sarcophage en calcaire contenait quant à lui les restes d’une femme âgée. Les analyses devront déterminer s’il existe un lien de parenté entre les défunts.
Autre enseignement : les individus avaient des moyens. « Nous sommes sur un secteur de la nécropole avec des individus probablement aisés car il fallait avoir des moyens pour collecter 400 kilos de plomb », explique Sophie Oudry, archéo-anthropologue à l’INRAP. « L’architecture des tombes est également impressionnante. On a des fosses très larges, très profondes, avec des coffrages en bois en plus des sarcophages et des équerres métalliques vraiment impressionnantes ». Un investissement de temps et de moyens qui témoigne d’un statut social important. Restera à déterminer ce statut : était-il militaire ou religieux ? « Cela va être difficile à connaître », reprend Sophie Oudry.
Enfin, les sarcophages présentent des similitudes, avec les mêmes motifs : des chrismes et des croix de Saint-André. Des éléments qui ne permettent tout de même pas de déterminer si les occupants étaient chrétiens ou païens car au Haut Moyen-Âge, les cultes païens empruntaient certains aspects de la chrétienté.
Tous les secrets n’ont pas été percés et de nombreuses questions restent en suspens afin de savoir comment on vivait à Arras à la fin de l’Empire Romain et au début du Moyen-Âge.